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Vue depuis le Conseil d’Administration - Opérer au sein de l'Économie de la Confiance

23/3/2017
Vue depuis le Conseil d’Administration - Opérer au sein de l'Économie de la Confiance

Je me souviens de la première fois que j’ai lu un commentaire produit sur Amazon. J’ai finalement décidé de ne pas acheter le produit électronique que je pensais initialement acquérir mais celui recommandé par les utilisateurs. Cela remonte au début des années 2000.

Je n’ai été capable d’exprimer que de nombreuses années plus tard l'expérience que je faisais alors d’une bascule fondamentale dans l’équilibre des pouvoirs entre la marque et le consommateur.

Il s’agissait bien plus qu’un rapport sur l'expérience produit des consommateurs... il s’agissait d’une transformation fondamentale de la manière dont les consommateurs collectent l’information avant de choisir “quoi acheter” dans leur processus de prise de décision. La voix d’un individu-consommateur prenait désormais plus de valeur que celle de beaucoup d’arbitres “professionnels” ou “traditionnels” définissant les valeurs, goûts et standards de qualité.

Si cela avait été le seul changement dans la dynamique d’achat, alors les choses n’auraient que peu changé les années suivantes. Mais Amazon et ses commentaires produits n’étaient qu’un des événements “fâcheux” d’une série qui a engendré les changements radicaux que nous vivons depuis…. Certains bons, d’autres moins.

Ces événements incluent :

1) L’essor des médias sociaux

2) Le déclin des médias traditionnels

3) L’essor puis le challenge de la publicité en ligne

4) La perte de confiance dans les grandes marques et la bascule vers le bouche à oreille.

Examinons de plus près chacun de ces événements.

1) L’essor des médias sociaux a permis l’émergence de leaders d’opinions en ligne

L’avènement des médias sociaux et le nombre toujours croissant de plateformes comme Twitter, Facebook et LinkedIn, Instagram et Pinterest, ont permis aux individus de communiquer avec le plus grand nombre et de partager leurs opinions sur toutes sortes de sujets.

A cela s’ajoute le phénomène des blogs, qui a permis à chacun de devenir un éditeur, ainsi que celui des podcasts, qui a permis à chacun de devenir un diffuseur. Prenez YouTube et Vimeo, grâce auxquels n’importe qui peut créer une chaîne télé. Initialement, il semblait que tout le monde se rassemblerait autour de quelques plateformes, mais nous voyons aujourd’hui que ces réseaux prolifèrent (pensez à Snapchat, Twitch, etc.). Et nous ne parlons encore que des plateformes dominantes aux États-Unis, chaque région ayant ses propres variations.

Chacun pouvant exprimer une opinion, et ce dans le format que l’audience souhaite consommer, nous avons assisté à l’émergence de leaders d’opinion en ligne.

2) L’utilisation des médias traditionnels a décliné tandis que celle des médias digitaux ne cesse de grimper

Avec la croissance des médias sociaux et l’essor de Netflix et de la télévision en ligne, les formes traditionnelles de médias ont démarré leur déclin : selon un rapport PQ Media, l’utilisation des médias traditionnels aux États-Unis a ainsi baissé de 2,4% en 2015, alors que celle des médias digitaux a augmenté de 33,5%. PQ Media prévoit une continuation de la baisse à un taux annuel composé de 2,1% jusqu’en 2019, ce qui signifie une baisse de plus de 10 heures par semaines depuis 2009.

Plus significatif encore, les dépenses de publicité en ligne ont pour la première fois dépassé celles de publicité télé aux États-Unis. Ceci renforce le déclin de l’influence des médias traditionnels, les dépenses publicitaires affluant vers le digital.

3) Le déclin de la publicité traditionnelle s’est traduit par l’augmentation de la publicité en ligne, qui s’est vite révélée être un faux espoir.

La publicité en ligne avait été annoncée par beaucoup comme la prochaine grande avancée de la publicité, du ciblage, etc. Sa popularité a explosé, du moins chez les annonceurs, mais quelques années après son arrivée fin des années 90, internet en a été saturé. Les promoteurs de cette approche ont tué la poule aux oeufs d’or. Un groupe d’organisations semblait être aux commandes de la publicité télé à ses débuts, et la sagesse commune était de considérer que trop de publicités au cours d’un programme ferait baisser ses audiences. Malheureusement, aucun standard similaire n’est apparu pour la publicité en ligne : les pages web sont passées de quelques bannières à beaucoup trop de publicité. Et les publicités vidéo, qui ralentissent considérablement les temps de chargement, se sont révélées très envahissantes. L’expérience devint si intrusive que les gens ont commencé à activement les ignorer.

Bien que les dépenses publicitaires augmentent, leur efficacité demeure décevante et constitue un défi permanent. Et cela parce que les anciennes tactiques qui fonctionnaient pour la publicité traditionnelle ne peuvent être transposées aux médias sociaux. Dans un monde saturé de contenu, la capacité d’attention des consommateurs a diminué. La publicité en ligne ne fait que promouvoir un message et ne génère que très peu d’engagement, n’ayant ainsi qu’une faible incidence.

4) L’érosion de la confiance dans les grandes entreprises est un sujet continu depuis des dizaines d’années

L’érosion de la confiance dans les grandes entreprises s’est accélérée à l’âge des médias sociaux et ne peut plus être occultée par un judicieux travail de RP. Les grands groupes de tabac l’ont ainsi appris à leurs dépens lorsque le public a découvert qu’ils connaissaient depuis des années les impacts négatifs de la cigarette sur la santé. Ou comment oublier le bug du processeur Pentium d’Intel, une des premières crises de confiance où les médias sociaux ont joué un rôle ?

Les entreprises n’ont pas été les seules à subir cette perte. Les gouvernements en ont aussi fait les frais, comme lorsqu’il est apparu clair que l’administration Bush était bien au courant de l’inexistence d’armes de destruction massive en Iraq. Ajoutez à cela le phénomène Wikileaks, ou le mensonge récent de Volkswagen à L'EPA (agence fédérale de protection de l'environnement américaine) au sujet du niveau réel des émissions de gaz polluants de ses véhicules. Il est assez courant pour des institutions de tout type de faire face à ces crises de confiance.

Les acheteurs d’aujourd’hui sont (beaucoup) mieux informés sur leurs choix

Ces crises de confiance, ajoutées à malheureusement beaucoup d’autres à travers le monde, ont obligé les consommateurs à tourner leur regard vers des individus bien informés et authentiques en ligne/sur les médias sociaux. Ces influenceurs opèrent à une échelle plus petite. Ils ont des connaissances spécifiques dans des domaines spécifiques, ce qui leur a apporté de la crédibilité et, plus important encore, la confiance des audiences spécialisées.

Aujourd’hui, quel que soit le marché, les acheteurs/consommateurs sont bien plus informés. Ils ont demandé conseil auprès de différentes personnes et sont déjà bien avancés dans leur processus de prise de décision d’achat : quoi acheter, pour combien, quelle utilisation, etc. Dans l'Économie de la Confiance dans laquelle nous opérons aujourd’hui, l’acheteur a le contrôle total de l’environnement.

Les business models d’aujourd’hui reposent sur la confiance et la transparence pour établir des liens.

Dans le fond, l’idée d’une Économie de la Confiance est parallèle aux concepts exposés par Tien Tzuo, CEO de Zuora, et ce qu’il décrit comme l’Économie de l’Abonnement.

J’ai discuté de ce sujet avec Tien et il m’a fait le commentaire suivant :

Ma vision de l'Économie de l’Abonnement est totalement dépendante de la notion de confiance que tu exprimes ici. “

Le concept de confiance est inhérent à l'Économie de l’Abonnement : l’objet/service/produit qui vous intéresse doit correspondre à ce que son vendeur/propriétaire en dit, et cette “confiance” découle d’une attente de transparence. Grâce aux avis consommateurs et aux influenceurs qui confirment que le service/produit en question correspond à sa description, la connexion à la marque est plus directe et la valeur du produit/service démontrée en continu. En conséquence, les acheteurs obtiendront ce qu’ils attendent.

Pour souligner cet aspect de l’économie du partage, le CEO de Blablacar décrit la confiance comme le fondement essentiel du business model de son entreprise.

Mon ancien collègue Peter Harrison de SnagaJob, un SaaS qui met les employeurs en relation avec des personnes recherchant des missions à l’heure dit également :

Nous approchons une époque où les employeurs embaucheront les travailleurs freelance sans les avoir rencontrés, en se basant uniquement sur leur profil en ligne auquel ils feront plus confiance qu’un entretien en face-à-face. Ceci annonce potentiellement un point de bascule qui redéfinira le travail en freelance, et finalement toute forme de travail. ”

Steve Lucas, CEO de Marketo, articule tous ces éléments dans un article sur l’Économie de l’Engagement. Elle “incarne les mutations profondes des rapports entre acheteurs et vendeurs, et s’étend à l’ensemble de l’organisation pour prendre en compte les clients, prospects, employés et partenaires.“ Ayant un nombre infini de canaux digitaux à portée de main, les marketeurs doivent comprendre comment, quand et pourquoi leurs clients souhaitent être engagés. Lucas cite l’exemple de Netflix contre Blockbuster : Netflix l’a emporté car sa plateforme offre l’expérience que le client souhaite. Par-dessus tout, Lucas note que réussir dans l’Économie de l’Engagement signifie “transformer son organisation en profondeur afin de créer des expériences authentiques et humaines qui reposent sur la confiance et l’attention.”

Avec la description de Tien de l'Économie de l’Abonnement, celle de Steve de l’Économie de l’Engagement et mon approche de l’Économie de la Confiance, nous nous retrouvons avec de nombreuses économies. Mais au fond, nous décrivons tous les trois le même phénomène : un changement fondamental de la manière dont une entreprise opère dans le contexte du XXI siècle.

Vendre des produits dans le monde d’aujourd’hui signifie un bouleversement des fonctions ventes et marketing

Qu’est-ce que l'Économie de la Confiance implique pour une marque ? Cette nouvelle réalité a radicalement impacté le rôle et les activités des équipes marketing et ventes.

Par le passé, le marketing était responsable des deux premières étapes du parcours d’achat : découverte et intérêt. La vente s’assurait du reste.

‍Source: Steve Patrizi: The New Marketing & Sales Funnel

Aujourd’hui, les entreprises/individus effectuant la plupart de la recherche et de l’analyse eux-mêmes, l'équipe marketing est devenue responsable d’activités qui tombaient auparavant dans l’escarcelle de la vente. L’équipe vente, elle, se focalise sur la conversion de leads très qualifiés en vente.

Ceci a considérablement accru le domaine d’autorité du marketing et, couplé avec la croissance des médias sociaux et des contenus, a ouvert la porte au succès grandissant du marketing d’influence.

Les marques doivent aujourd’hui s’associer aux consommateurs, dont la voix contrôle désormais le marché.

Dans ce monde nouveau, la marque doit fonctionner en partenariat avec ses consommateurs, et parmi eux, certaines voix influencent les autres de manière plus significative. Dans le cadre de l’ensemble du processus marketing, entrer dans une relation proactive avec ces influenceurs peut engendrer un impact significatif sur la perception du produit/service et ainsi grandement impacter ses ventes (en bien ou en mal).

Traackr a été conçu comme une plateforme permettant aux marques d’identifier, gérer et mesurer les interactions avec ces influenceurs. Considérez-la comme le CRM du marketeur.

En plus d’adopter des outils SaaS pour gérer ces relations de confiance, les marques doivent également se transformer dans les 3 domaines clés suivants :

La Culture de la Confiance - fondamentalement, un modèle économique basé sur la confiance demande aux entreprises de :

  • Adopter de nouveaux niveaux et modèles de transparence
  • Dialoguer avec le consommateur au lieu de diffuser un message
  • Être honnête sur son offre pour que le consommateur comprenne ses aspects positifs et négatifs
  • Admettre ses erreurs avec intégrité et transparence
  • Travailler avec les influenceurs pour façonner le produit/service dans le temps et lui permettre d’évoluer en fonction des besoins des utilisateurs

La Gestion de la Confiance - votre mère vous l’a probablement répété, “ la confiance est difficile à obtenir mais très facile à perdre. ” Lorsqu’une marque adopte une culture basée sur la confiance, l’objectif pour elle est d’établir ce principe avec ses clients : il s’agit d’une marque en laquelle on peut avoir confiance. Il est essentiel de gérer cette relation de confiance à travers  divers processus, en se concentrant sur l’échange et le dialogue avec les influenceurs clés. C’est une chose que peu de marques savent faire. Et peu d’entre-elles ont les outils en place pour mener cette activité à bien.

La Mesure de la Confiance - gérer requiert de mesurer et de monitorer, ce qui implique une diversité d’outils de mesure servant de “proxy de la confiance” et permettant aux marques d’améliorer ou de maintenir leur niveau de confiance au sein du marché.

L’opportunité pour les marques de l’Économie de la Confiance

Alors qu’internet a bouleversé le monde, les entreprises existantes qui se sont avérées incapables de l’intégrer à leur business ont été balayées et remplacées par celles sachant le faire. D’autres ont par contre su rapidement (et douloureusement) se transformer et ont évolué vers les nouveaux paradigmes disponibles.

Le passage à une Économie de la Confiance suivra le même chemin ; la destruction créatrice de Schumpeter va se reproduire. La confiance pousse les entreprises à innover et mettre au défi leurs pratiques, réinventant totalement les processus opérationnels au-delà des murs de l’entreprise. Lyft, Airbnb et Tesla sont d’excellents exemples d’entreprises qui ont mis la confiance au coeur de leur ADN. D’autres entreprises qui existent déjà devront encore considérablement se reconfigurer pour embrasser les concepts de l’Économie de la Confiance et s’épanouir dans ce nouveau paradigme.

Prêt(e) à développer un marketing d’influence plus performant ?