Ce n'est pas tous les jours que l'on rencontre la professionnelle du marketing des technologies qui a aidé Steve Jobs à lancer le premier Macintosh. En 30 ans, elle a contribué à la création de nouvelles catégories de produits, au lancement de nouvelles marques et de centaines de produits. Il s’agit d'Andy Cunningham, que j'ai récemment eu le privilège de rencontrer en personne.
À l'occasion de la sortie de son nouveau livre, Get to Aha!, Andy est venue au siège de Traackr à San Francisco afin de discuter de son modèle éprouvé pour transformer les marchés et les industries. C’est avec une grande impatience que j’ai préparé quelques questions afin d’apprendre de son expérience.
Chez Traackr, nous travaillons avec des entreprises qui doivent gérer la tension existant entre leur volonté de contrôler leur marque et l'impact que les médias sociaux ont sur sa perception. Comment les entreprises parviennent-elles encore à contrôler leur image à l'heure des médias sociaux et dans un contexte de méfiance croissante des consommateurs vis-à-vis du marketing ? Lisez mon entretien avec Andy Cunningham pour en apprendre davantage sur ce sujet et sa pertinence pour le marketing d'influence.
KC : Comment prenez-vous en compte les influenceurs et leaders d’opinion, qu’ils soient ou non d'accord avec vous, dans le processus de positionnement de manière à encore pleinement définir vous-même la vision de la marque ?
AC : Je crois fermement que vous pouvez toujours contrôler votre marque. Je pense même que les marques ont davantage de contrôle aujourd'hui. Il existe énormément de nouveaux canaux dont nous sommes propriétaires. Internet a généré beaucoup de dialogue et nous a aussi donné SnapChat, Instagram, Facebook, LinkedIn, nos propres sites web, et bien plus encore. Nous contrôlons ce que nous publions sur ces canaux. Nous n'avons aucun contrôle sur la réponse du public, mais nous pouvons maîtriser le contenu que nous choisissons de diffuser.
Si vous travaillez dur après avoir défini votre positionnement, que vous créez un storytelling captivant, que vous travaillez sans relâche pour le diffuser sur vos propres canaux (pas seulement une ou deux fois, mais des centaines et des centaines de fois), et si vous le combinez à des phrases virales développées lors de votre exercice de positionnement, vous constaterez alors que ces dernières restent, se diffusent et reviennent vers vous à travers le dialogue.
KC : une fois que vous avez établi le positionnement et le message de votre marque, comme Uber par exemple dont le fondateur a imposé une certaine image de son entreprise, est-il possible de changer le storytelling ?
AC : Changer le storytelling d'une entreprise demande un réel leader, pas simplement une personne qui gère la société. J'ai vu des leaders échouer, et d'autres y parvenir. IBM s'est livré plusieurs fois à l'exercice. C'est tout à fait faisable, regardez Microsoft : Satya Nadella fait un travail incroyable.
Dans le cas d’Uber, Travis était un bon leader car beaucoup de gens et d'investisseurs le suivaient. Pour changer les choses, ils auront besoin d'un nouveau storytelling, de messages viraux et d’un leadership fort pour les diffuser sans relâche sur tous leurs canaux. C'est le défi auquel Uber est confronté aujourd'hui.
KC : Pour définir votre positionnement et faire connaître votre marque, quel est selon vous le rôle du marketing d'influence et comment ce rôle a-t-il évolué au cours des 10 dernières années ?
AC : Le marketing d'influence repose sur votre capacité à vous, l’entreprise, d’influencer l'influenceur et non sur celle de l'influenceur à influencer votre audience. Voyez cela comme une dynamique de double influence : il vous faut influencer l'influenceur pour qu'il puisse à son tour influencer le marché. Cela se rapproche des journalistes que nous avons toujours cherché à influencer afin qu’ils influencent leur audience.
Je pense que le secret du marketing d'influence est déjà de mettre la main sur Traackr !
KC : À trop faire appel aux influenceurs, prend-on le risque d’aiguiller votre marque vers le mauvais message ?
AC : Si vous considérez que votre rôle, en tant qu'entreprise, est d'influencer les influenceurs, alors vous garderez le contrôle. Disons que vous pilotez un avion et que vous avez besoin de commander et de contrôler la situation. Si vous laissez une partie de cet environnement vous contrôler, vous êtes mort dès la minute où vous lâchez les commandes.
C'est la même chose ici. A la minute même où vous cessez de guider votre marque là où vous le souhaitez, c'est la perte assurée. Vous ne pouvez suivre l’avis de tout le monde ou vous risquez de chercher à faire ”tout pour tout le monde”, ce qui veut dire pas grand chose.
Une chose que vous pouvez faire en revanche est d’identifier des influenceurs pour votre entreprise et de constituer un comité consultatif sur votre produit. Ils apprécieront que vous leur demandiez leur avis, et deviendront ainsi des « conseillers ». Ils donneront alors de leur personne et agiront comme des émissaires pour votre marque. Vous n'êtes pas obligé de suivre leurs conseils de modifications à apporter au produit, même si ce qu’ils disent peut être important. Mais en leur demandant conseil et en les écoutant avec attention, vous pourrez vous faire des amis et influencer les gens.
KC : Dans votre livre, vous parlez du fait d'être authentique. Que faut-il pour l'être ? Comment convaincre les gens que vous l'êtes ?
AC : Nous avons tous un radar d’authenticité interne. Lorsque vous vous asseyez avec une personne et que vous discutez avec elle, vous pouvez dire si elle est authentique ou non. Il n'est pas question de bonté ou de méchanceté, mais de qui vous êtes. Les humains ont un radar pour ça. Si vous vous lancez sur un marché et dites être autre chose que ce que vous êtes réellement, cela se sait rapidement.
Dans la situation de Harvey Weinstein par exemple, sa véritable personnalité a fini par éclater au grand jour.
En tant qu'entreprise, vous devez savoir qui vous êtes. En tant qu'être humain, vous devez savoir où vous êtes bon, et où vous ne l'êtes pas.
Les athlètes savent incroyablement bien tirer parti de leur ADN. Ils travaillent très dur toute leur vie avec leurs entraîneurs pour l'exploiter au mieux et le magnifier.
Les gens qui ne sont pas authentiques n'inspirent tout simplement pas le respect.
KC : Qu'est-ce qui vous a inspiré à écrire ce livre ?
AC : Alors que je réfléchissais au processus de gestion des RP et de la stratégie pour des centaines de marques, un de mes clients ne cessait de me demander « Comment faire ? Quel processus suivre ? ».
Pour répondre à cette question, je me suis livrée à un exercice de reverse-engineering sur la façon dont je travaille le positionnement d’une marque. J'ai réalisé que je catégorisais ces entreprises en trois groupes : Mécanique, Mère et Missionnaire. Je me suis livrée à cet exercice afin de répondre aux questions suivantes :
J’ai partagé ce processus avec mon client afin de l’aider à le comprendre, et ai réalisé que je pouvais aller encore plus loin.
KC : Si vous deviez ajouter un chapitre à votre livre, de quoi parlerait-il ?
AC : Certainement de l'ingénierie, de la collaboration entre ingénierie et marketing. Les ingénieurs aiment résoudre les problèmes. Quelle valeur un marketeur peut-il tirer d’une relation avec un ingénieur ? C'était comme une annexe qui sortait du projet original parce que c'était le seul chapitre axé sur les entreprises orientées vers le produit, ou celles que je qualifie de « Mécaniques ». C'est pourquoi mon éditeur m'a conseillé de l'enlever. Cela ferait toutefois un excellent essai.
KC : Dans quelle mesure faut-il s’inquiéter de la concurrence ?
AC : Je pense que vous devez vous préoccuper de la concurrence s'il s'agit d'une entreprise dont l’ADN est similaire au vôtre (par exemple, des entreprises qui sont axées sur le concept, le produit ou le client).
En tant qu'entreprise axée sur le client, vous [Traackr] avez une longueur d'avance, ce qui est un facteur de différenciation qui joue en votre faveur. Vous n'êtes pas obligé de tout surveiller sans cesse. Si une autre entreprise apparaît, fait ce que vous faites, et qu'elle porte une grande attention sur le client, vous devez garder un œil dessus.
Chez Microsoft, Satya Nadella réalise un exploit incroyable. En tant qu'entreprise centrée sur les produits, il prend le produit et tire parti de l'ADN de Microsoft... Il ne dit pas « nous devenons une société centrée sur le client »... Il se tient à son produit et l’améliore encore et encore.
Je voudrais sincèrement remercier Andy Cunningham pour son temps, et vous encourage vivement à lire son nouveau livre, Get to Aha! Le lire a permis d'affirmer ce que nous faisons en interne pour gérer notre marque et notre storytelling, et ainsi influencer ceux qui influencent notre marché.
J'aimerais savoir ce que vous demanderiez à Andy Cunningham si vous passiez un moment avec elle. Écrivez votre question dans les commentaires.